- OLIVARES (comte-duc d’)
- OLIVARES (comte-duc d’)OLIVARES GASPAR DE GUZMÁN comte-duc d’ (1587-1645)Appartenant à une noble famille andalouse Gaspar de Guzmán, comte-duc d’Olivares était le troisième fils d’Henri, deuxième comte du même nom, qui assumait des fonctions diplomatiques au service du roi d’Espagne Philippe II, et de María de Pimentel de Fonseca; son père était ambassadeur à Rome au moment de sa naissance et Gaspar ne voit l’Espagne pour la première fois qu’en 1600, lorsque sa famille rentre dans la mère patrie. Destiné à la carrière ecclésiastique, le jeune Gaspar étudie le droit et la théologie à l’université de Salamanque entre 1601 et 1604. Cette année-là, la mort de son deuxième frère (l’aîné avait péri accidentellement plusieurs années auparavant) fait de lui l’héritier du titre et des biens de la famille. Dès lors, il accompagne son père à la cour et s’initie à la tâche que lui vaut le majorat. Peu après la mort du comte d’Olivares, il épouse en 1607 doña Inés de Zuñiga y Velasco, dame d’honneur de la reine Marguerite, et jusqu’en 1615, il séjourne tantôt en Andalousie pour gérer ses propriétés, tantôt à Madrid pour se faire connaître des milieux officiels. En 1615, Philippe III d’Espagne marie son fils à Isabelle de Bourbon, et le comte d’Olivares, en qualité de gentilhomme de la Chambre, accompagne l’infant à la frontière française, où il va recevoir sa jeune épouse. Il profite de ses nouvelles fonctions pour multiplier les manœuvres contre le favori de Philippe III, le duc de Lerme, en flattant l’ambition du fils de ce dernier, le duc d’Uceda. Lerme essaie de neutraliser l’intrigant en lui proposant la charge de majordome en chef de la maison du roi, mais en vain. Avec l’aide de son oncle, Baltasar de Zuñiga, ambassadeur à la cour impériale, Olivares obtient le renvoi de Lerme au profit du duc d’Uceda. Il figure désormais aux côtés du nouveau favori lors des déplacements du roi. En 1621, Philippe III meurt et Olivares travaille d’abord dans l’ombre de son oncle Zuñiga, qui occupe le poste de Premier ministre de Philippe IV jusqu’à sa mort (1622); il devient alors le favori en titre du roi et dirige pendant vingt ans la politique. À l’intérieur, il commence par désavouer l’action des ministres successifs de Philippe III qui ont dilapidé le trésor du royaume (il fait même exécuter l’un d’eux, Rodrigo Calderón) et, pour remettre de l’ordre dans l’économie espagnole, il crée une junte réformatrice (1623): celle-ci élabore une série de vingt-trois articles, dont les plus marquants ont trait à la réduction des charges municipales, aux restrictions somptuaires, à des mesures destinées à favoriser l’accroissement de la population. La visite du prince de Galles, prétendant à la main d’une infante d’Espagne, et les fêtes qui en résultent compromettent l’application de ces plans, et la seule réforme mise en œuvre est l’abolition du port de la fraise.Par ailleurs, un projet financier devrait permettre de réduire les dettes contractées par la couronne envers les marchands étrangers (établissement d’un système bancaire national) et de procéder à une répartition plus équitable des impôts entre les provinces (abolition de l’«impôt des millions», création d’une contribution proportionnelle au nombre d’habitants); Olivares se heurtant à l’opposition des Cortes, ces plans sont abandonnés en 1626; en outre, l’aide fiscale demandée aux autres régions, au même titre qu’à la Castille, est interprétée par elles comme une atteinte à leurs statuts d’autonomie: l’Aragón et Valence répugnent à verser des subsides pour des campagnes à l’étranger, la Catalogne les refuse et les visites effectuées par Philippe IV et Olivares dans les royaumes d’Aragón et leurs Cortes respectives (1625-1626) ne détendent pas l’atmosphère. Pour assurer l’entretien des armées réparties sur les champs de bataille d’Europe, Olivares doit recourir aux prêts des juifs portugais. L’inflation de 1627 rend inévitable la dévaluation de la monnaie de billon (1628), et le déficit ne peut être comblé par suite de la capture d’une partie du trésor du Mexique par les corsaires hollandais (1628). Dans la décennie qui débute en 1630, la politique fiscale d’Olivares provoque des soulèvements: le premier en Biscaye, en 1631, peut être réprimé, mais celui de Catalogne, qui éclate à la suite des exactions commises par les troupes en marche vers la France (1639), dégénère en une véritable guerre, la subversion de toutes les classes sociales étant appuyée par le royaume voisin. Encouragé par cet exemple, le Portugal se révolte en décembre 1640, le duc de Bragance se faisant proclamer roi sous le nom de Jean IV, et la province devient, elle aussi, le théâtre d’un conflit entre Olivares et Richelieu; l’Andalousie elle-même essaie de se constituer en État indépendant sous l’égide du duc de Medina Sidonia. Malgré les mesures déflationnistes de 1642, l’économie est ruinée. Le comte-duc échoue aussi dans sa tentative de réforme administrative pour remplacer les conseils traditionnels par des juntes composées d’hommes nouveaux.Paradoxalement, le favori, homme de progrès dans sa façon de gouverner, demeure attaché à une hégémonie de l’Espagne dans le monde, que celle-ci n’a plus les moyens d’assumer. Dès 1621, il ne renouvelle pas la trêve de douze ans avec les Pays-Bas, alléguant les actes de piraterie hollandais contre les possessions espagnoles d’outre-mer. En 1623, l’échec du mariage anglais réduit à néant une possibilité d’alliance, et les corsaires britanniques se risquent même à attaquer Cadix (1625); encouragé par des succès militaires aux Pays-Bas (Breda, Nordlingen), qui valent à Olivares son titre de comte-duc, il proclame par décret l’«union des armes» en 1626, qui est sapée, comme on l’a vu, par les provinces imbues de leurs privilèges. Pendant un certain temps, l’Espagne et la France luttent par personnes interposées: l’épisode de la succession du duché de Mantoue illustre cette première étape: légalement ce territoire revient au duc de Nevers, mais Olivares, y voyant une menace contre ses possessions du nord de l’Italie, ordonne l’invasion du duché et la guerre dure jusqu’en 1631. Les succès espagnols en Allemagne sont sans lendemain; la multiplication des fronts et l’incapacité des chefs militaires contribuent aux revers des Espagnols en Flandre (Breda, les Dunes), au Brésil où ils perdent le contrôle de la mer au profit des Hollandais, en Catalogne où les Français s’emparent du Roussillon (1642). Le roi finit par céder à la pression des nobles et des provinces non castillanes qui réclament le départ du favori. En 1643, Olivares est exilé et, ne désarmant pas, publie un libelle, Nicandro , pour justifier sa politique; mais la réhabilitation n’intervient pas; le comte-duc sombre dans la démence et meurt à Toro.
Encyclopédie Universelle. 2012.